mercredi 30 mars 2016

SCC10/21 - DES VOIX SE FONT ENTENDRE, DES POINGS SE LEVENT, DES GENS SE DRESSENT



Bien des choses ont changé au Luabongo
Le pays bouge.

Des fermes se créent. Des usines se construisent. Des immeubles s'élèvent. Des magasins s'ouvrent. Des chalumeaux crépitent au fond des parcelles et dans les ateliers.


Les travailleurs obligatoires et chicotés du bagne colonial (porteurs de charges, de malles-cantines et de tipoys, main d'œuvre des plantations, cantonniers, mineurs et ouvriers, chauffeurs et cheminots, catéchistes, moniteurs des écoles primaires, aides-soignants, agents agricoles, clercs et commis, soldats et sergents de la Force publique, boys-cuisiniers, boys-lavandiers, nounous et couturières, sentinelles) sont devenus des hommes libres.
Nombre d'entre eux sont, à présent, chefs d'entreprise et propriétaires d'immeubles, d'ateliers, d'usines et de magasins.
Les « 6 ans primaires » et les « quatre ans post-primaires » du temps des Noko sont devenus des médecins spécialistes, des chirurgiens de pointe, des professeurs d'université de renommée internationale, des ingénieurs des mines, des ingénieurs civils, des ingénieurs agronomes, des ingénieurs commerciaux, des ingénieurs en télécommunications et des informaticiens de haut niveau.

Une bourgeoisie d'entrepreneurs (bâtisseurs,fabricants, prestataires de services,etc), non directement subordonnés à des intérêts économiques étrangers, se lève et ces « possédants » ne doivent pas non plus leurs avoirs à des charges ou à des faveurs qui leur auraient été consenties par les sorciers mais à leur propre entreprise. 
Cette nouvelle bourgeoisie ne doit plus grand chose à un  système sorcier qui la tond ou la rançonne... et elle ne s'en accommodera pas indéfiniment.



Les choses bougent, le monde et le pays changent, un peuple se lève et fait entendre sa voix


Et, surtout, voici que de nouvelles formes d'organisation sociale apparaissent dans les chefferies et les secteurs, les bourgs autonomes et les villes franches, les quartiers et les cités, les campagnes et les mines, les usines et les universités...
Au sein d'une population qui n'a aucune charge ni faveur à attendre des sorciers, une exigence grandit.
Partout et dans tous les milieux, des voix se lèvent et se font entendre.

La voix des vendeurs ambulants des marchés, bousculés et rackettés par les corps habillés en bleu ou en kaki.
L
a voix des familles et des proches des passagers « clandestins » des trains de la SNCL morts non-identifiés, enterrés dans des fosses communes, lors des dernières catastrophes ferroviaires du Katanga.

La voix des chefs de village dont l'autorité est bafouée et que des prédateurs de biens collectifs font jeter au cachot, celle des « Zaïrois » refoulés de Fara-Fara et parqués dans des dépotoirs humains, celle des victimes de viols massifs effectués par des hommes en uniforme, armés et commandés.
L
a voix des familles, des avocats et des proches des victimes (au nombre sous-estimé) des bousculades de Kikwit ou du stade Tata Raphaël, celle des cheminots de la SNCL « boucs émissaires » des autorités et celle des enseignants impayés depuis des mois... ou des années, celle des agents de la Sonas ou de l'OCC revendiquant des droits légitimes, celle des clients des sociétés de distribution d'eau et d'électricité sommés de payer des factures correspondant à des services non-prestés, celle des habitants du site Ango Ango à Matadi dont l'entreprise Sep-Luabongo menace de détruire toutes les maisons, celle des délégués syndicaux licenciés illégalement, celle des personnes qui ont dû fuir les combats au Nord-Kivu et dont les maisons ont été incendiées, les biens emportés et les champs pillés, celle des habitants des villages désertés après une attaque des Bakata Katanga ou des éleveurs Mbororo, celle des chrétiens de la paroisse Kiwanuka de Buta qui ne veulent plus de leur évêque « indigne », celle des agriculteurs de Kanyama qui peinent à écouler leurs produits aux Kasaï suite à la rareté des trains-marchandises de la SNCL et au mauvais état de la route.
la voix
des enseignants de la baronnie de Popokabaka qui doivent se déplacer jusqu'à Kenge pour toucher leur maigre salaire, celle des habitants du bourg de Dibindi à Mbuji-Mayi qui protestent contre la mort d'une femme tuée « accidentellement » par un corps habillé de la police, celle des habitants du chef-lieu du Nord-Kivu qui sont obligés de se rendre chaque jour au lac Kivu pour y puiser de l'eau, celle des éleveurs de porcs de Malemba Nkulu dont les bêtes ont été décimées par la maladie, celle des agents des entreprises de transport City Train et Stuc dont les entreprises sont en voie de liquidation ...

La voix aussi des travailleurs de la Gécamines impayés depuis des mois, des orpailleurs de Banalia rançonnés par des corps habillés de l'armée agissant pour le compte du sorcier légataire ayant reçu en prébende la 9ème région militaire, la voix des coureurs cyclistes invités à participer à la dernière édition du Tour du Luabongo et qui craignent d'être rackettés par le responsable de la Fédération Luabongaise de cyclisme...
La voix des forçats-creuseurs clandestins de Kawama dispersés à coups de feu par les corps habillés de l'entreprise CMSK, la voix des bouchers de Watsa obligés donner au sorcier territorial local 2 kilos de viande par bête abattue, la voix des cultivateurs de Kambove victimes du déversement de déchets toxiques dans trois rivières (Kalunika, Kasenshi et Kalumbubashi) qui traversent leurs champs...
La voix des habitants de Bokungu dont le bureau de la cité aurait été vendu à un opérateur économique de la contrée par le sorcier ayant reçu la baronnie en prébende, la voix des pêcheurs Luabongais détenus dans un cachot à Gisenyi, au Rwanda...
La voix des agents des services chargés de fouiller les bagages à l’aéroport international de la Luano à Lubumbashi, protestant contre l’arrestation de certains d’entre eux après une altercation avec la voyageuse, épouse d’un sorcier (régalien ou feudataire), qui avait refusé que ses bagages soient fouillés avant d’embarquer dans un avion en partance pour la ville-duché d'Expo
La voix des habitants de Mbuji-Mayi dont la ville est menacée d'enclavement.
La voix des pharmaciens de Goma rackettés par les « services » ou des journalistes de radio Muungano d’Oïcha arrêtés par les mêmes « services »
La voix des évêques de l'Église catholique et des « jeunes chrétiens » de la paroisse Sainte Famille à Kisangani
La voix des tshukudeurs de Goma
La voix des Pygmées du Tanganyika
La voix des vendeurs (légumes, fruits, habits, chaussures, etc) qui ont fui le « ticket étalage » quotidien du marché Zigida et ont installé un marché pirate sur l’espace Type K, dans le prolongement de la piste de l’aéroport de Ndolo, là même où un avion de transport Antonov s'est crashé au décollage en janvier 1996 provoquant la mort de plus de trois cent personnes  et qui, depuis lors, a cessé d’être un marché et est devenu un « espace », interdit au commerce.
La voix  des Shégués de la ville-duché d'Expo…  Boni, Mère ? Lelo vendredi !
La voix de Dadi Bumba Mayalale et des familles de Floribert Chebeya et de Fidèle Bazana.
 

La voix des parents de Vainqueur Bukaka, petite fille de 18 mois emprisonnée avec son père dans le cachot d'un sous-ciat (le petit ligablo de police de Matadi Kibala) et y est morte asphyxiée au troisième jour de sa détention.
La voix des agriculteurs dépossédés de leurs terrains de culture par l’entreprise minière Rubamines à Likasi. 
La voix des cultivateurs du quartier Luano dans la commune annexe à Lubumbashi accusant l’entreprise minière Ruashi Mining de polluer leurs champs. 
La voix des habitants de Joli Site à Kolwezi dont le quartier a été rendu invivable par les odeurs nauséabondes émanant de l’usine de traitement chimique de l’entreprise minière KCC
La voix des djeuns des bourgs autonomes de Bumbu (alias Rome) et Selembao (alias Washington) réunis au sein du mouvement «Tabala, jeunes à vos marques».
La voix des « retournés » Luabongais, en provenance de la ville de Pointe-Noire et enregistrés à la frontière de Kimpangala dans la baronnie de Tshela.
La voix des Wewa interpellés par des corps habillés de la police au croisement des avenues Gambela et Force publique dans le bourg autonome de Kasa-Vubu. 
La voix des passagers d'un bus Mercédès 207 assurant le transport sur le ligne UPN-Buadi (départ au croisement des avenues Marine et Masikita) qui ont été attaqués et que des "coupeurs de route" ont dépouillés de tous leurs biens (porte-monnaie, liquidités cachés dans les chaussettes, les soutien-gorge ou les slips, montres, téléphones, ceintures, chaussures, bracelets, colliers, pagnes et foulards de tête, derniers achats effectués en vue bien « fêter » le lendemain, sans compter les 92.000 FL du « versement » de la journée que le chauffeur a dû céder aux...
Nous aussi, les militaires et les policiers, on existe ! Nous aussi, on est des personnes !
- Mais si vous nous prenez tout, comment allons-nous fêter la Bonana ? Et que deviendront nos familles ?
- Nous aussi, on a des familles ! Nous aussi, on doit fêter
assaillants armés, des corps habillés déguisés en « civils » probablement)  le 31 décembre, aux alentours de 23 heures
La voix des habitants des quartiers Mfinda et Munganga de Binza-Ozone, dans le bourg autonome de Ngaliema, dont les rues sont devenues impraticables et auxquels les véhicules, les pousse-pousse et même les taxis-motos ne peuvent pas accéder et où les sacs de riz, de ciment de charbon de bois ou de bois de chauffe sont transportés sur la tête de porteurs rétribués en fonction de la distance parcourue
La voix des habitants du quartier Mombele, dans le bourg autonome de Limete, victimes d'incessantes coupures d'eau et d'électricité et qui envisagent de faire la grève du paiement de leurs factures.
 

La voix des habitants des villes, des centres ou des cités, des secteurs ou des chefferies, des quartiers ou  des groupements, des localités ou  des villages dont les marchés, les champs et les greniers, les routes et les rues, les pistes et les sentiers... les sites d'exploitation forestière ou agricole, les carrés miniers et carrières d'extraction d'or, les territoires de chasse et les zones de pêche sont investis et ravagés par des bandes armées de corps habillés de différentes obédiences : à Kisangani, Bunia, Bukavu et Goma... à Sumbi, Mbandakani, Mbata Siala et Luozi... à Gatumba... à Lahudjo, Fataki, Bule, Mbau... à Kiwanja et Shabunda... à Zombe, Kikindi, Kitamba, Kalungu et Bugumbu... à Ngandu, Butezi, Kakanga et Kasongo... à Sake et Minova... à Numbi, Fungamwaka, Chamilonge et Kakenge... à Molokaï, Bindani, Babeso, Selesele et Badengaido... à Salaté, Tafuteni et Fungamukaba... à Kiseguru et Nyabanira... à Mulungu, Kamituga, Kibati, Busi, Ndurumo, Abulo, Kashebere, Mungazi et Kichanga... à Katubilwa, Lukenshi, Kaswatula, Kazeba, Wemba et Mukunda... à Mutarule, Nyamugali et Katekama... à Kimpembwe, Wankenge, Nyakavunga et Ubambu... à Kitowa, Musenge, Mayombiya et Mukuku...  à Kasuwo, Kaheri, Bunyatenge et Mbwavingo... à Kyona, Nzini, Mwenge, Kasama et Kizabi... à Kwiyongo, Kwisinga, Kapanda, Kamakumbi et Tombwe... à Nyabanira, Makoka et Kasave... à Kisharu, Kiseguru et Buramba... à Buloloma, Erengeti, Oicha, Mayi Moya et Mbau... à Kambamba, Musenge, Mifuti, Mungomangoma, Masanganano, Kirongote, Kapemba, Karete et Otobora... à Buloloma et à Oïcha... à Nyamushenga, Bwegera et Luvungi... à Buma, Lubomo, Ona, Mwanzalulu, Karamba et BaKara... à Yungu, Talama et Sebele.... à  Magoba, Gahira, Chebumba et Kalungu... à Mungazi, Kibati, Ishunga, Mpofi, Kalembe, Kishanga et Kibua... à Muheto et Kahira... à Chanzovu, Kagogo et Mugogo... à Mbingi, Alimbongo, Pitakongo, Mbughavinywa, Kirumba et Luofu... à Soba, Nyamamba et Kafé... à  Nzovu-Monde... à Bushugulu, Matutira, Bunyangungu et Charamba... à Bunje, Mianda, et Tushunguti-centre... à Biangama, Lumba et Kinzanza... à Moseka, Kibambo, Kyolo, Nkisha et Lumbule... à Rubaya (dans le Masisi) et à Maweka (dans la forêt de Gandja)... à Kabonzo, Kamazembe, Masumbuko et Mudinda... à Mukula Kulu, Kazovu et Bunkeya... à Magelegele et Munguredjipa... à Mwambangu... à Kamandi et à Kikuvo... à Benye Kamba, Olowo, Oleke et Tchombe... à Kagaragara, Tenge-Tenge et Kahanda... à Kabengiele, Kanana-Konyi et Ejiba-Mpengie... à Bapaitumba et à Bapakombe... à Kawama… à Bushugulu, Matutira, Bunyangungu et Charamba... à  Bunje, Mianda et Tushunguti-centre... à Amalasa, Omaimbeya, Mukwanyama, Obolongo, Songolo, Tungi, Tingitingi et Otiakase... à Penekusu, Binzele, Kikamba et Nyalukungu... Kazimwe, Kisanga et Muhungu... Kiliba et Kahwuzi... à Namunindi, Rushima et Kanganiro... Lubomo et Mwayenga... à Mwebe, Kahamba, Kapando et Kafutu... à Kabuyu et Musebe... à Kibeleketa... à Kamanyola... à Lugungu... à Malemba Nkulu… à Bukonde, Kabingu et Ngaha… à Bukumbirwa, Kishongya, Rusamambo et Kanune… à Bunyatenge et Muhanga… à Zunguluka, Alongi et Sisa… à Kisenga… à Kamandi-lac, Ndwali, Buhoyo et Kamandi-Gîte… à Nyamilima… à Mukoko… à Moba-Kirungu… à Katombe… à Kyona Nzini… à Yambi Enene…
 

La voix de Martin Mwamba Mudimbo, 47 ans, marié et père de 7 enfants, licencié en économie, qui, faute de trouver un emploi correspondant à son diplôme, était devenu chauffeur de taxi à Lubumbashi... et qui, excédé par les "tracasseries" policières continuelles dont les taximen font l'objet, s'est immolé par le feu, le 28 octobre 2015, sur l'avenue Sendwe, en plein centre-ville, en "tenant fermement" un roulage, entré de force dans sa voiture et qui cherchait à le racketter

La voix des représentants de la société civile, des activistes de la Lucha et de Filimbi, des lanceurs d'alerte et sentinelles de la citoyenneté,des défenseurs et "chiens de garde" des droits de l'homme, de l'Etat de droit et de l'égalité de tous devant la loi
La voix des changeurs de monde et passeurs d'idées nouvelles, hérauts d'une pensée positive, tournée résolument vers l'avenir et affranchie des pesanteurs du passé

 
La voix de mes amis Mopoie et de Bangazegino, prisonniers politiques éligibles à la loi d'amnistie et maintenus arbitrairement en détention à l'Université de Makala.
La voix de tous les prisonniers politiques de l'Université de Makala… ce « campus » autoproclamé ou ces « oubliettes » qui, au fil des années, de protestation en protestation, de soulèvement en soulèvement, de répression  en répression, de guet-apens en guet-apens, d’enlèvement en enlèvement, de mise au secret en mise au secret, de traitements inhumains et dégradants en traitements inhumains et dégradants, de procès inique en procès inique, d’embastillement en embastillement, s’est transformé progressivement non seulement en centre de résistance à la dictature mais aussi en centre de recherche, d’information, d’analyses socio-politiques et de diffusion d'idées nouvelles et en bastion irréductible d’une pensée positive, tournée résolument vers l’avenir et affranchie des pesanteurs du passé
La voix de tous les prisonniers politiques de toutes les prisons, de tous les cachots clandestins et de tous les bagnes du pays ...





Ndlr : Vous êtes perdu(e)s ?
Et vous vous demandez où trouver un plan de la ville, un menu de la semaine ou une table des matières quelconque… et comment avoir accès à chacune des différentes séries de séquences du buku « sorciers, services et crapuleux » ?
Problème ezali te, cliquez sur : http://sosecra.blogspot.be/













Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire